Le présent article est tiré du chapitre Généralités – point 6 du cahier artistique n°04 : « Bijoux berbères en argent de Tunisie, Monhel, 2023, 244 pages, Amazon »*. Publié également sur :https://heliouiahmedmuseum.blogspot.com/
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Evolution
des bijoux de la Melia des nomades en bijoux des Keswas des sédentaires
Comme susmentionné, la 1ère
classe des bijoux en argent des berbères nomades se distingue par des œuvres en
argent massif, le métal mystique et bienveillant des berbères. Parfois, avec
simple apport de coquillages, de pierres en verre coloré et autres perles et
coraux.
La deuxième classe de bijoux
berbères fait suite notamment à l’évolution du statut social des berbères
redevenus sédentaires, à l’évolution des techniques et à des contraintes
socio-économiques et géopolitiques. Elle se distingue par des bijoux assez
légers tout en reprenant les modèles antérieurs avec adjonction de design
innovant, de sertissage de pierres semi-précieuses et de dorure, en rupture
avec les traditions ancestrales et les tabous.
Fig.G06 - Bijoux berbères en argent de 2ème
génération.
Photo de gauche: Pendentif de
forme rectangulaire conçu à base de feuille et fil d’argent mince, doré et
émaillé, avec multitudes d’anneaux de connexion pour pendeloques et chainettes.
Photo de droite: Berbère
sédentaire habillée en Keswa régionale, de conception et couleurs différentes
de celles de l’habit de la Melia de la berbère nomade. Les bijoux de la Keswa
ont nettement évolué par rapport à ceux de la Melia: La parure de poitrine
(Chapitre 06) est désormais constituée de 2 fibules rondes reliées par un
ensemble de pierres semi-précieuses et de coraux rouges, avec un élément
central de forme rectangulaire en argent doré et émaillé. Bracelets de main en
argent sertis de pierres totalement différents de la sobre Hadida en argent.
Collier du cou en perles. Parure de tempe en tissu ornementé d’éléments
rectangulaires en argent dorés et émaillés.
Réf. ARTmedina-tounes. Annexe sur le copyright et les œuvres tombées dans le domaine public.
La 2ème
génération des bijoux berbères est imprégnée des techniques en usage dans les villes
où la conception des bijoux est fortement influencée par les civilisations
colonisatrices de la Tunisie dont celle byzantine avec ses modèles de ronds,
carrés et rectangulaires ; dorés, émaillés et striés.
Les circonstances géopolitiques du 17ème siècle, notamment l’expulsion en masse des mauresques et juifs d’Espagne, ont aussi contribué énormément à l’essor de la classe 2 des bijoux berbères en particulier et au développement de l’économie de la régence de Tunis en général. Tout en impulsant la croissance dans tous les domaines, de l’industrie à l’agriculture, jusqu’aux arts de la bijouterie et de l’argenterie. Des expulsés juifs généreusement accueillis par des Deys et Beys visionnaires, Othman Dey (1594-1610) et son successeur Youssef Dey (1610-1647), en les répartissant judicieusement à travers la régence, ce qui a permis la création de nouvelles cités florissantes à l’exemple de Testour au nord et de Soliman au Cap Bon.
Les
habits de Keswas régionales
Liés au départ à l’habit de
la Melia, les bijoux berbères en argent connaitront des évolutions régionales
significatives avec l’évolution de l’habit de la Melia (jusque-là indémodable
et fédératrice) en divers habits de Keswas régionales, plutôt séparatistes.
En évoluant, les premières
Keswas régionales de la femme berbère sédentarisée ont gardé la conception de
base de la Melia nouée avec des fibules Khlel avant de s’en débarrasser
définitivement. L’évolution s’est fait ressentir surtout au niveau du choix des
tissus, des couleurs et du design de bijoux dorénavant dorés, émaillés et
sertis de pierres semi précieuses. A partir du 20ème siècle, la
conception des Keswas régionales ne faisait plus appel à la fibule (Khlel),
élément essentiel de la Melia ancestrale. Mais si la conception de l’habit a
nettement évolué, celle des modèles antérieurs de bijoux berbères sont restés
la plateforme de base pour l’évolution et l’innovation.
Fig.G07 -
Bijoux en argent d’origine berbère de Tunisie de 2ème génération.
Photo de gauche : Pendentif en
forme de poisson conçu à base de feuille et fil minces en argent ; doré et
serti de pierre en verre coloré (Musée
Helioui Ahmed de l’argenterie et des arts)**.
Photo de droite: Keswa
régionale de Mahdia brodée avec du fil d’argent doré (ou en or pour les plus
fortunés) en nette évolution et innovation au 21ème siècle.
Toutefois, les bijoux et accessoires, comme le pendentif en forme de poisson ou
la parure de tempe en Sultani et Mahboub (Monnaies beylicales d’origine
ottomane), gardent toujours le lien avec les modèles de bijoux antérieurs –
Réf. ARTmedina-tounes. Anonyme.
Les Keswas et leurs bijoux
de la classe 2 sont aujourd’hui sauvegardés par de nombreuses «Familles
tunisiennes», à saluer. Synonyme de fierté identitaire des régions et des villes,
les Keswas et leurs bijoux sont fièrement apprêtés par ces familles, encore
généreuses, à l’occasion des cérémonies de mariage et autres évènements
festifs.
» ….
Monhel
Copyright
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