Ci-après, la mise à jour
d’un article publié sur mon blog en 2009, puis retiré en 2013.
Le peintre orientaliste russe Alexandre Roubtzoff, tunisien d’âme et de cœur, a légué au patrimoine multiethnique de Tunisie de magnifiques portraits de bédouines, si riches en informations culturelles, de portée identitaire.
Son portrait de la bédouine en train de recevoir le Harkous sur son visage regorge de maintes informations sur les pratiques de beauté des bédouines de Tunisie. Le bras étant magistralement tatoué par le Wshem(tatouage bédouin), ainsi qu'une partie du visage.
Fig.01-
Partie d’une « Toile » d’Alexandre Roubtzoff * – Bédouines deTunisie en
début du 20ème siècle – Pratique du Harkous sur le visage de la
bédouine – Le produit Harkous de couleur noire, différent du Wshem de couleur verte,
est étalé sur un ustensile en poterie, tenu par la main gauche de la
praticienne de beauté – Le bras de la bédouine étant déjà tatoué par le Wshem –
(Réf. ARTmédina-tounes .doc).
Si le Harkous est appliqué
comme un produit adhérant à la peau à l'aide d'une «tige pinceau», le Wshem est
appliqué dans la peau à l'aide d'une aiguille. Le Harkous de couleur noire
partira au bout d'un certain temps, alors que le Wshem laissera son empreinte
verte pâle éternellement.
Fig.02
– Partie d’une photo d'Ernest Gustave Gobert** - Application du Henné sur la
main de la mariée - Scène se déroulant dans le patio d’une demeure tunisienne
de la médina en début du 20ème siècle – La praticienne de beauté, de
dos, est en train d’appliquer le Henné sur la main droite de la jeune citadine,
reconnaissable de part ses habits « évolués » en design par rapport
aux habits de la femme rurale et de la bédouine nomade de la même époque. Les
deux femmes étant assisses sur un tapis de part le sol. En face, on aperçoit l’ustensile
en poterie contenant le Henné, préparé auparavant par la praticienne selon sa
propre formulation, héritée depuis de belles générations, comme c’est le cas
pour le Harkous(teinture) et pour le Wshem (tatouage) – (Réf. ARTmédina-tounes
.doc).
D'un groupe ethnique à
l'autre, de la berbéro bédouine nomade à la citadine, en passant par la rurale
sédentarisée, les pratiques de beauté se succèdent en s'innovant. Une fois
sédentarisée, la bédouine rurale de Tunisie gardera la pratique du Harkous mais
n'appliquera plus le Wshem qui dénote dorénavant une pratique de groupe
rétrograde. Le Henné supplantera le Wshem selon la loi implacable de
l'évolution des "groupes". Une loi variable à la sinusoïdale, puisque
un siècle plus tard, le Wshem (tatouage) refait son apparition, cette fois ci, à
la mode mondialiste.
Fig.03
– Partie d’une photo d'Ernest Gustave Gobert** - Henné et Harkous appliqués sur
une main – (Réf. ARTmédina-tounes .doc).
La cérémonie du Henné se
pratique dorénavant dans le Woust Dar (patio) à l'intérieur de la maison, en
présence des membres du "groupe" qui ne ratent jamais une occasion
pour festoyer et danser au son de la Darbouka.
Pour que le Henné adhère
parfaitement à la peau, la main de la mariée est introduite dans une "poche
à Henné". Bien enveloppé à une température stable, le Henné donnera à la
main un éclat rayonnant. Les plus chanceuses des mariées, plutôt les plus
fortunées, auront à leur disposition des poches à Henné tissées à la soie et
brodées au fils d'argent.
Avant l'avènement des
produits de beauté de synthèse chimique, les produits de beauté des groupes
ethniques de Tunisie (de la bédouine nomade, à la femme rurale sédentarisée jusqu'à
la citadine de la Médina) étaient des produits à base d'ingrédients naturels.
Le Khol, poudre noircissante des yeux ; le Harkous, teinture de beauté
noire ; le Henné, teinture rougeâtre de l'amour ; le Tfal, poudre de roche
nettoyante des cheveux,... les parfums de rose, de jasmin... Chaque région se
vantait de ses produits naturels. De multitudes de labels régionaux se sont
ainsi imposés dans les souks, bien avant les appellations d'origine. Le Henné
le plus réputé de Tunisie est cultivé dans la région de Gabès, aux portes du
désert. Sa préparation répondant à un savoir faire transmis d'une génération à
l'autre, permet d'aboutir à la couleur de « l'amour au naturel », une
couleur vive, rouge brunâtre.
Monhel
ARTmédina-tounes
Copyright
*Lire l'article sur Alexandre Roubtzoff, publié sur ARTmédina-tounes:
http://art-tounes.blogspot.com/
*Lire l'article sur Alexandre Roubtzoff, publié sur ARTmédina-tounes:
http://art-tounes.blogspot.com/